Panache 2023

Panache – voilà un mot qui ne revient pas fréquemment dans toutes les conversations. Mais chez nous, chez Rapha, on l’entend souvent. 

Dérivé du mot latin pinnaculum, qui signifie « petite aile » ou pic (qui donne également le mot pinacle), le nom panache signifie à l’origine un plumage de plumes dans le couvre-chef de la noblesse. Soit un insigne d’honneur et un symbole ancien de force et d’audace.

Retour vers le futur du monde du vélo : en 2023, le mot panache sert à décrire les exploits cyclistes faits de courage et de désir. C’est renoncer à toute tactique préconçue et plutôt rouler à l’instinct. C’est aussi courir avec astuce, et rouler au-delà des limites. Et voilà ce qui fait la beauté du cyclisme : avoir des éclairs de génie et pédaler contre vents et marées pour atteindre la grandeur, quel qu’en soit le prix.

Voici donc notre célébration annuelle et la rétrospective des moments forts de vélo de l’année, avec leurs coups de génie, leurs coups d’éclat, le cran, la ruse, bref, tout ce qui définit le panache dans le plus grand sport du monde.

« La course cycliste c’est dur. Et jusqu’à maintenant ce n’était qu’un rêve. »

Alison Jackson, la virtuose du pavé, a fait preuve de résilience, de patience et surtout, avait les jambes qu’il fallait ce jour-là pour remporter la plus grande course d’un jour au monde. Et elle l’a fait de la manière la plus spectaculaire qui soit, avec un style qui lui est propre. Jackson a quasiment à elle seule emmené l’échappée jusqu’aux bandes du vélodrome de Roubaix, en dictant la cadence pour ne pas être rattrapée par le peloton. « Tracko Jacko » s’est ensuite parfaitement positionnée, accélérant sur Marion Borras dans le dernier virage pour franchir la ligne d’une longueur de vélo et devenir la première Canadienne à remporter le pavé mythique. 

« On va danser ce soir ! »

La liesse de la coureuse et de son équipe immédiatement après sur la piste est à savourer. Et oui aussi, on peut le dire, rien d’étonnant à ce qu’elle ait eu les meilleures jambes compte tenu de la tenue qu’elle portait ce jour-là. En effet, les Pro Team Knee et Arm Warmers lui ont peut-être donné l’avantage sur ses adversaires qui couraient elles « à découvert ». On pourra mettre ça sur le compte de l’expérience, du timing, et peut-être du sponsor textile…

« J’ai tenté le coup. Et dès que le premier écart s’est creusé, j’ai fait cavalier seul, en poussant tout ce que j’ai pu jusqu’à l’arrivée ».

Nous pouvons également revenir sur une autre grande course d’EF Pro Cycling lors de la campagne des Classiques : celle de Ben Healy</u> sur l’éprouvant Liège-Bastogne-Liège. La quatrième place de l’Irlandais sur le difficile parcours de 258 km au sud de la Belgique a été rendue possible par les efforts phénoménaux qu’il a dû déployer pour revenir sur Remcoe « L’Aéroballe » Evenepoel dans les 30 derniers kilomètres. Hélas, il n’est pas monté sur le podium, mais cette remontada a mis en lumière toute la classe de ce jeune homme de tout juste 22 ans. Healy avait 12 ans lorsque son compatriote Èireannach Dan Martin sort vainqueur de la Doyenne. Aussi, espérons qu’il pourra suivra son exemple et l’imiter dans un avenir pas si lointain.

« J’aime la course et j’aime être offensif. Partir en chasse sur une étape, c’est ça qui me plaît. »

Bien sûr, il convient également de mentionner la victoire d’étape de Healy sur le Giro, où il a placé son attaque dès la montée de Capuccini dans les Apennins, puis enchaîné 50 kilomètres en solo pour décrocher une victoire historique au cœur de l’Italie. Et vous savez ce que nous dirons aussi de son équipement… Ce jour-là, il portait une TT Suit</u> adaptée, dont la version « remixée » devrait bientôt être ouverte à la vente et proposée à davantage de cyclistes dans le monde entier.

« Oh mon Dieu, mais quelle journée ! J’ai foncé tête baissée sur ce run, je n’avais plus rien à perdre. »

Voilà un autre Canadien qui innove, cette fois en allant très très vite sur un vélo tout suspendu. Le jeune Jackson Goldstone, originaire de Whistler, a connu une première année folle en tant que coureur de haut niveau et il a été le seul athlète à remporter deux épreuves consécutives de Coupe du monde. Et cette dernière course de la saison au Mont-Sainte-Anne, au Québec, lui a permis de clore son année de façon très impressionnante. Flanqué du numéro 13 sur son vélo et sur son dossard, le jeune homme de 19 ans a mis le public en ébullition lors d’une dernière course fulgurante. Le petit démon de la descente a été porté par ses amis et ses fans présents en nombre sur le parcours, et leur a offert une véritable démonstration, sans peur et tout en habileté.

« L’année dernière, lors du Giro, j’étais derrière sur toute la course. Cette année est donc pour moi vraiment spéciale. »

Il y encore quatre ans, Kristen Faulkner travaillait comme investisseuse en capital-risque. En 2023, elle remporte le maillot de meilleure grimpeuse et deux victoires d’étape sur le Giro Donne. Cette diplômée en informatique de Harvard est tombée amoureuse du cyclisme à l’âge de 23 ans et, après avoir récemment remporté le contre-la-montre élite aux Jeux panaméricains de Santiago du Chili, Kristen a pour objectif de participer aux Jeux olympiques de 2024. La course de Faulkner sur les Strade Bianche - où elle est montée sur la troisième marche du podium - a aussi mis en lumière tout son talent. Et elle vient tout juste de signer chez EF Pro Cycling. Excellent.

« C’est vraiment trop bien ! Je n’ai vraiment pas les mots pour décrire ce que je ressens. C’est mon premier maillot arc-en-ciel. Je suis juste trop heureuse ! »

Kasia Niewiadoma n’avait plus gagné de course depuis 2019. Et puis là, tout d’un coup, on l’a revue danser la Polka sur la boîte à sept reprises en 2023. L’événement le plus marquant a sans doute été sa victoire aux Championnats du monde UCI de Gravel en Italie. Lançant son attaque à 20 km de l’arrivée, Kasia a montré de quoi elle était capable et a poursuivi sa route pour décrocher une victoire au courage, sous un beau soleil d’automne.

« C’est une position que je ne pensais pas pouvoir occuper et c’est ça qui est merveilleux. »

Sur les routes brûlantes d’Espagne en septembre, Sepp Kuss, originaire de Durango, Colorado, a fait ce que ni Lance Armstrong ni Greg LeMond n’ont pu faire en leur temps : remporter la Vuelta a España. Et en parlant de LeMond, la bataille interne qui a suivi entre Kuss et ses équipiers de la Jumbo-Visma a rappelé un peu le Tour 86, où l’Américain et le Français Bernard Hinault s’étaient livré un duel mythique sur l’Alpe. C’est Kuss qui a lancé les hostilités, avec Roglič et Vingegaard lancés à ses trousses, suivis par un groupe d’autres prodiges du WorldTour. Faisant preuve de courage et d’un grand sang froid, il a connu son heure de gloire lors de la 17e étape, en défendant sa position de leader malgré les abandons de Roglič et de Vingegaard. Kuss a su rester concentré sur son objectif et sur sa place de leader du général sur les derniers kilomètres et sévères pourcentages de l’éprouvant Angliru.

En transformant la douleur en panache, Lachlan Morton est parvenu à ériger en art ses exploits en autonomie d’un continent à l’autre. 

« C’est dans ces moments que je réalise à quel point je suis proche d’atteindre mes limites mentales et que je ressens un véritable plaisir à les atteindre. »

Cet homme, qui redéfinit les limites de ce qu’un coureur professionnel peut et veut s’infliger en tant qu’athlète, explore vraiment la frontière sauvage du sport d’endurance. Le Tour Divide, qui traverse les États-Unis d’un bout à l’autre, incarne l’esprit pionnier du bikepacking et le porte à un tel niveau, qu’y penser seulement donne des sueurs froides. 

Le prochain documentaire retraçant cette aventure - filmé et réalisé par Gus Morton (le frère aîné de Lachlan) - est à manquer sous aucun prétexte, et donne un bel aperçu de la folie de la dépendance d’un homme face à la longue distance.

« J’essaie d’être un être humain aussi accompli que possible, car je pense en effet, qu’en fin de compte, c’est un sport d’individualités. »

La victoire de Sam Boardman 'sur la colline de Cry Baby sur la Tulsa Tough cette année a été l’une des plus belles pour l’un des héros au grand cœur du peloton américain. Ce coureur talentueux qui a très souvent travaillé de manière désintéressée pour permettre à ses coéquipiers de franchir la ligne en premier, a « décroché » pour connaître lui aussi son moment. Et les amateurs de courses de critérium lui ont manifesté un immense élan d’amour, car Boardman jouit d’une reconnaissance et d’une admiration unanimes. Une victoire riche en émotions.

« Cette année, j’avais décidé de tout donner. Il allait falloir envoyer pour m’accaparer cette victoire. »

En pulvérisant le record de la course de VTT sans doute la plus difficile au monde, Keegan Swenson s’est détaché d’un groupe de 13 coureurs et a remporté la victoire en solitaire, avec 25 minutes d’avance sur ses plus proches poursuivants. Incroyable.